
En juin, dans plusieurs villes du monde, on célèbre le « jour des fiertés ». Parti d’une protestation, ce mouvement a pour but de défendre et de soutenir les droits à la liberté et à l’égalité des personnes qui ont des orientations sexuelles différentes du modèle hétérosexuel dominant. Cette revendication prend ses racines dans la lutte contre les violences et la discrimination dont ont été, et sont encore victimes, les personnes désignées aujourd’hui sous le sigle un peu « barbare » de LGBTQIA+ ou de LGBTQQI2SAA. Si vous êtes capable de faire correspondre chacune de ces lettres à un mot complet, je vous tire mon chapeau.
À titre personnel, j’ai toujours eu du mal avec les sigles qui visent à désigner les êtres humains, parce que même s’ils ont vocation à décrire plus précisément des « profils » pour qu’ils puissent affirmer leur identité ou pour qu’ils puissent parfois être entendus et défendus ; ces successions de petites lettres peuvent aussi avoir pour conséquence d’étiqueter, de pointer du doigt, de stigmatiser, de marginaliser, voire de discriminer les personnes concernées. Ainsi en est-il dans d’autres domaines que la sexualité. Pauvres SDF, PMR, DE et autres SMICARS ! qui font oublier que l’on parle, avant tout, d’hommes et de femmes « sans domicile fixe », de « sans abris », de « personnes à mobilité réduite », de « demandeurs d’emploi » ou de personnes touchant un « salaire minimum » largement insuffisant pour faire face aux besoins de première nécessité et aux crises économiques, sociales et sanitaires successives. Dans le registre des religions et des origines ethniques ou nationales, chacun y va aussi de son étiquette ou de son label. Blacks, Blancs, Beurs, Asiats, Latinos et autres appellations d’origine se bousculent au portillon. Ainsi va la vie.
Pour les uns, porter son genre ou son orientation sexuelle en étendard est tout aussi légitime que d’être fiers de ses origines ou de ses croyances, surtout quand il a fallu - et quand il faut encore - se cacher pour être libre d’être qui l’on est et d’aimer qui l’on veut. Pour les autres, porter son orientation sexuelle ou ses origines importe peu, car cela ne génère pas de regards fuyants ou agressifs, de phrases gênées ou assassines, de discrimination familiale, sociale ou à l’embauche, de brimades ou de coups violents. Et pour d’autres encore, s’afficher Gay Friendly relève de la dernière tendance à la mode, pas toujours sincère, pourvu qu’il s’agisse de faire grimper l’audimat ou d’acquérir de nouvelles parts de marché bien lucratives. Pour de nombreuses marques, le Pink Washing est bien lancé !
Que l’on soit hétérosexuels, lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, non-binaires, agenres, cisgenres, queers, en questionnement sur sa sexualité, intersexes, bispirituels, androgynes ou asexuels, cela ne devrait poser de problème à personne ; de la même manière que de pratiquer ou non une religion, d’avoir ou non des opinions politiques, d’avoir telle ou telle couleur de peau. Si chacun respectait les droits fondamentaux des êtres humains à vivre, travailler, penser, s’exprimer et aimer librement (dans le respect et le consentement bien sûr), personne ne devrait avoir à compenser la honte qui s’abat sur sa « différence » en affichant des étendards arc-en-ciel.
Si chacun respectait les droits fondamentaux des êtres humains à vivre, travailler, penser, s’exprimer et aimer librement (dans le respect et le consentement bien sûr), personne ne devrait avoir à compenser la honte qui s’abat sur sa « différence » en affichant des étendards arc-en-ciel.
Les hétérosexuels sont-ils obligés de défiler une fois par an pour dire qu’ils sont fiers d’être hétéros ? Non. Ils et elles sont naturellement autorisés et adoubés par l’opinion générale. Ils pourront s’afficher en public, se tenir la main, s’embrasser, se mettre en ménage, être fiers de s’aimer. Cela ne choquera (presque) personne. Encore qu’aimer qui l’on veut (même en étant hétérosexuel) reste ou devient un problème de plus en plus inquiétant, dans plusieurs pays du monde. Mais que les choses soient claires, il ne s’agit pas ici de dénoncer la marche des fiertés. Il ne s’agit pas de dire aux LGBTQIA+ « rentrez chez vous, on vous a déjà assez vu ! Il n’y a pas de problème. Circulez. Il n’y a rien à voir.»
Cette marche reste malheureusement nécessaire pour rappeler le nombre croissant de meurtres et de violences dont sont victimes les personnes humaines cachées derrière des sigles peu compris du grand public. En effet, les personnes LGBT peuvent légalement être licenciées de leur emploi dans de nombreux États simplement parce qu’elles sont homosexuelles ou transgenres. Beaucoup d’entre elles déclarent avoir dû cacher leur identité au travail pour éviter la discrimination, y compris dans des pays qui ne pénalisent pas les personnes LGBT. Faut-il rappeler que, selon le rapport 2020 de l’Association internationale des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et intersexes (Ilga), l’homosexualité est réprimée par la loi dans encore 69 pays du monde ? Faut-il rappeler que la peine de mort est la sanction prévue en cas de relations sexuelles entre adultes de même sexe dans six pays : l’Arabie saoudite, le Brunei, l’Iran, la Mauritanie, le Nigeria, le Yémen et l’Ouganda qui vient de grossir les rangs des pays qui ne respectent pas les droits humains à ce sujet. En effet, dans les dernières réglementations en date, a été adoptée ce printemps, en Ouganda, la « loi anti-homosexualité 2023 », l’une des plus répressives au monde. Selon le texte, toute personne commettant un acte d’homosexualité aggravé, devient « passible de la peine de mort », ce qui signifie que les récidivistes pourront être condamnés à être tués. La loi impose, par ailleurs, à tout citoyen de « dénoncer une personne qu’elle soupçonne ou croit être homosexuelle ». Cela signifie que chaque personne en Ouganda devient un bras armé de la police nationale et que la « chasse aux gays » pourra officiellement commencer. Une chasse aux LGBT purement légale dans ce pays, mais qui ne saurait minimiser celle pratiquée en catimini, certains soirs, par des groupes de personnes qui viennent « casser du pédé ou de la gouine » dans les rues ou les transports plus ou moins bien fréquentés de nos villes françaises. Mais qui s’en soucie ?
Une chasse aux LGBT purement légale en Ouganda, mais qui ne saurait minimiser celle pratiquée en catimini, certains soirs, par des groupes de personnes qui viennent « casser du pédé ou de la gouine » dans les rues ou les transports plus ou moins bien fréquentés de nos villes françaises.
Alors, à quand la possibilité pour les LGBTQIA+ de passer inaperçus malgré leur différence ? À quand le droit à l’indifférence dont bénéficient les personnes hétérosexuelles qualifiées d'« homme » ou de « femme » à la naissance ? À quand le simple droit d’être juste des humains, comme les autres, envisagés comme tels, égaux et libres en droit et dans leur vie de tous les jours ?
Michelle Jean-Baptiste
Et si vous voulez comprendre le détail du sigle LGBTQIA+ ou en savoir plus sur les difficultés liées au Coming out, lisez les chroniques rédigées par Paul. C’est ici en liens cliquables.

LGBTQQIAA+, ça veut dire quoi ?
Vous vous sentez un peu has been car vous ne comprenez plus ce que tous ces sigles et acronymes veulent dire ? Pour vous, le « L » signifie « for the way you Look at me » de Franck Sinatra ? Pas de panique, l’association Humains en action s’occupe de tout, et vous deviendrez incollable sur le sujet !
Le premier sigle (et le plus célèbre), le LGBT, est apparu aux alentours des années 70. Tous les nouveaux termes (LGBTQI+, LGBTQ+, LGBTQIA+ ou LGBTQQI2SAA) ont vu le jour dans le courant des années 2010, dans un objectif de créer un sigle plus inclusif, l’ancien ne répondant alors plus à toutes les identités sexuelles et de genre.
Décryptons-les !
L : Cette lettre représente les personnes lesbiennes. Il s’agit de femmes qui sont attirées par d’autres femmes, romantiquement et sexuellement parlant.
G : Cette lettre représente les personnes gays. Il s’agit d’hommes qui sont attirés par d’autres hommes, romantiquement et sexuellement parlant.
B : Cette lettre représente les personnes bisexuelles. Il s’agit d’hommes et de femmes qui sont autant attirés par les hommes que par les femmes, romantiquement et sexuellement parlant. Il est possible de ressentir une attirance envers les deux genre de manière simultanée, ou bien différées pendant différentes périodes de la vie.
T : Cette lettre représente les personnes transgenres (on parle de transidentité). Il s’agit de se définir autrement que par le genre qui nous a été attribué à la naissance par notre sexe. Une personne transgenre peut réaliser des opérations chirurgicales ou NON.
À noter : À l’inverse, être cisgenre signifie se sentir en adéquation avec le genre qui nous a été attribué à notre naissance en fonction de notre sexe (exemple : je suis né avec un pénis, je suis donc considéré homme et je me sens homme, alors je suis cisgenre.
Q : Cette lettre représente les personnes queers. Elles ne sont pas définies par une caractéristique particulière si ce n’est qu’elles s’excluent de ce que représente la définition de l’hétérosexualité. En un sens, il s’agit également d’un mot générique qui permet d’inclure toutes les personnes LGBTQQI2SAA, et de la ré-appropriation d’une insulte (signifiant « bizarre » ou « étrange ») longuement utilisé dans les pays anglophones contre les hommes féminins et les femmes masculines.
Q : Cette lettre représente l’aspect « en questionnement ». Terme là aussi assez générique, il représente le processus de questionnements qu’un individu va être amené à se poser dès lors qu’il aura des doutes sur son identité de genre ou sa sexualité.
I : Cette lettre représente les personnes intersexes. Il s’agit de personnes nées avec des caractéristiques sexuelles particulières ne permettant pas de les assigner de manière binaire (soit homme, soit femme). En l’espèce, c’est un cas rare, mais qu’il faut bel et bien prendre en compte. Dans la plupart des cas, les nouveaux-nés subissent de très grosses opérations correctives à la suite de leur naissance. Ces opérations ont pour but de les faire rentrer dans cette binarité dictée par la société, au détriment de la santé des nouveaux-nés. De nombreux témoignages font surface ces derniers temps afin de dénoncer les procédés médicaux peu souvent éthiques, qui obligent des très jeunes individus à subir des opérations très graves avec un traitement particulier qui produira énormément d’effets secondaires. Il est temps de mettre fin aux tortures médicales afin de coller aux diktats moyenâgeux.
2S : Ce sigle reprend le terme autochtones d’Amérique du Nord « two spirit », aussi connu en France pour « bispiritualité ». Il s’agit de se définir comme homme ET femme à la fois.
A : Cette lettre représente les personnes androgynes. Il s’agit d’individus se définissant entre les genres hommes et femme, au travers de leur apparence physique (tenue vestimentaire comprise). À noter : Leur caractéristique est purement d’apparence physique, et non pas biologique.
A : Cette lettre représente les personnes asexuelles. Ces personnes n’éprouvent aucune attraction sexuelle pour qui que ce soit : à comprendre vis-à-vis d’elles-mêmes, ou d’autres personnes. Pour autant, par pression sociale ou pour faire plaisir à l’autre, les personnes asexuelles peuvent avoir des relations sexuelles. Elles n’en tireront aucune satisfaction, si ce n’est la satisfaction de faire plaisir à l’autre. À ne pas confondre avec l’abstinence sexuelle, qui s’avère dans ce cas être un choix.
Le + : Très souvent à la fin de plusieurs sigles, vous retrouverez le « + » dans l’optique de vouloir dire « et tous les autres ». C’est une façon de pouvoir/vouloir inclure le plus de monde se sentant en dehors des « clous » de l'hétérosexualité cisgenre.
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